Fiscalité & structuration patrimoniale

Loi de finance 2026 : Les dangers pour les holdings

Le projet de loi de finances pour 2026 vient d'introduire une nouvelle taxe qui va faire du bruit : une imposition à 2% sur les actifs des sociétés holdings non affectés à une activité professionnelle.

Loi de finance 2026 : Les dangers pour les holdings


Le projet de loi de finances pour 2026 vient d'introduire une nouvelle taxe qui va faire du bruit : une imposition à 2% sur les actifs des sociétés holdings non affectés à une activité professionnelle.

Si vous détenez votre patrimoine via une holding, si vous avez structuré vos investissements immobiliers ou financiers dans une société, cette taxe vous concerne probablement. Et elle peut coûter cher.

Voici tout ce qu'il faut savoir pour comprendre si vous êtes dans le viseur, comment la taxe se calcule, et surtout comment l'anticiper.

Ce qui a déclenché cette nouvelle taxe

Cette mesure vise la "taxe Zucman", du nom de l'économiste Gabriel Zucman qui milite depuis des années pour une taxation accrue des grandes fortunes. Le projet initial prévoyait une taxe plancher de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros.

La version adoptée en Conseil des ministres le 14 octobre 2025 est plus ciblée : elle ne vise pas directement les individus, mais les actifs patrimoniaux détenus dans des sociétés holdings, avec des seuils d'application plus accessibles.

L'objectif affiché : taxer les actifs "passifs" détenus en société, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas utilisés dans le cadre d'une activité professionnelle réelle. Les voitures de collection, les yachts, les œuvres d'art, l'immobilier de jouissance, les portefeuilles de titres dormants... tout ce qui dort dans une structure sans générer d'activité économique devient imposable.

La France rejoint ainsi d'autres pays européens (États-Unis, Irlande, Luxembourg) qui ont déjà instauré des dispositifs similaires.

Le texte doit encore être voté par l'Assemblée nationale en lecture définitive. Le Premier ministre s'est engagé publiquement à ne pas recourir à l'article 49.3 de la Constitution, ce qui signifie que le texte peut encore évoluer lors des débats parlementaires. À suivre de près.

Application prévue : exercices clos au 31 décembre 2025 pour les sociétés ayant leur siège social en France, sans limitation de durée pour le moment.

Qui est concerné par cette taxe ?

Territorialité : sociétés françaises et étrangères

La taxe s'applique aux sociétés holdings qui ont :

  • Leur siège social en France, qu'elles soient assujetties de plein droit ou sur option à l'impôt sur les sociétés
  • Leur siège à l'étranger si elles sont assujetties à un impôt équivalent ou sont des sociétés de capitaux, et qu'au moins un des associés contrôle la société à son domicile fiscal en France

Autrement dit : même une holding luxembourgeoise ou suisse peut être concernée si elle est contrôlée par un résident fiscal français.

Les conditions cumulatives pour être taxable

Pour être soumise à cette taxe, une société holding doit remplir simultanément les conditions suivantes à la date de clôture de l'exercice :

1. Détenir au moins 5 millions d'euros d'actifs

On parle ici de la valeur vénale (valeur de marché) de l'ensemble des actifs détenus par la société. Pas la valeur comptable, la valeur réelle.

2. Avoir au moins une personne physique détenant 33,33% ou plus

Cette personne doit :

  • Détenir directement ou indirectement (via son cercle familial : conjoints, partenaires de PACS, concubin, ascendants, descendants, frères et sœurs) au moins un tiers des droits de vote ou des droits financiers de la société
  • Ou exercer en fait le pouvoir de décision dans la société

Cette condition vise clairement les holdings familiales ou patrimoniales, pas les grandes structures cotées ou les holdings industrielles avec actionnariat dilué.

3. Percevoir des revenus passifs supérieurs à 50% du total

La société doit percevoir majoritairement des revenus "passifs", c'est-à-dire :

  • Dividendes
  • Intérêts
  • Redevances
  • Produits de droits d'auteurs
  • Loyers
  • Produits de cession d'un bien générateur de revenus passifs

Sont exclus du calcul : les dispositifs de cash pooling (gestion centralisée de trésorerie en groupe), qui représentent plus de 50% du total des produits d'exploitation et des produits financiers.

Si votre holding ne fait que gérer un portefeuille de titres et encaisser des dividendes, vous êtes dans le viseur. Si elle a une vraie activité opérationnelle ou de gestion active, vous êtes probablement exonéré.

4. Ne pas être contrôlée par une société soumise à cette taxe

Pour éviter la double imposition, une holding filiale n'est pas taxée si sa société mère l'est déjà.

Comment se calcule la taxe : taux et assiette

Un taux de 2%

La taxe est calculée au taux de 2%, appliqué sur les actifs patrimoniaux de la holding.

C'est un taux fixe, qui ne dépend ni du montant des actifs, ni du niveau de revenus générés.

L'assiette : quels actifs sont taxés ?

La taxe s'applique sur la somme des éléments suivants :

a. Les biens meubles corporels

Sont taxés :

  • Les œuvres d'art
  • Les voitures de collection
  • Les yachts
  • Les biens immeubles (résidences secondaires, immobilier de jouissance)
  • Les droits portant sur ces biens

Tous ces actifs sont pris en compte à leur valeur vénale, c'est-à-dire leur valeur de marché à la date de clôture de l'exercice.

Déduction des dettes : Si la société a emprunté pour acquérir ces biens immobiliers, les dettes contractées sont déductibles, selon les modalités analogues à celles de l'IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière).

Exclusion des actifs affectés à l'activité professionnelle : Sont exclus les biens et droits affectés à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale exercée par la société holding, par une société liée, par le redevable ou par une société dans laquelle ce redevable exerce son activité (à proportion de l'affectation professionnelle, si usage mixte).

Exemple concret : votre holding détient une Ferrari de collection de 2 millions d'euros et un immeuble de bureaux loué à une société opérationnelle du groupe. La Ferrari est taxée. L'immeuble de bureaux ne l'est pas, car il est affecté à une activité professionnelle.

b. Les disponibilités et titres détenus

Sont taxés :

  • Les liquidités et titres financiers détenus par la société
  • Mais seulement après application d'un mécanisme de minoration complexe

La fraction imposable est minorée des montants suivants :

  1. La fraction non encore employée des sommes apportées à la société lors d'une augmentation de capital réalisée au cours des 3 mois précédant la clôture de l'exercice, et destinées à l'exercice de son activité opérationnelle éligible.

Autrement dit : si vous faites une augmentation de capital en novembre pour investir dans une activité réelle en janvier, les liquidités correspondantes ne sont pas taxées pendant les 3 premiers mois.

  1. La fraction non encore réemployée du montant des produits constatés au titre des deux derniers exercices clos, résultant de la cession de biens ou droits affectés à une activité opérationnelle, ou de titres de participation (à l'exclusion de ceux visés à l'article 163 quinquies B du CGI).

Si vous avez vendu des actifs professionnels en 2024 et que le produit de cette vente dort en trésorerie en attendant d'être réinvesti, il n'est pas taxé pendant deux ans.

  1. Le plus élevé des montants suivants :
    • 15% de la valeur vénale des biens détenus à la date de clôture
    • Deux fois le montant moyen du résultat comptable constaté au titre des 3 derniers exercices clos
    • Le montant des dettes à 1 an au plus détenues à la date de clôture de l'exercice
    • La moyenne des montants des actifs immobilisés acquis au cours des 3 derniers exercices et affectés à l'exercice de l'activité opérationnelle

Cette minoration vise à ne pas taxer la trésorerie "de fonctionnement" nécessaire à l'activité de la société.

c. Les participations dans des filiales non cotées

Si votre holding détient des participations dans des filiales non cotées, contrôlées directement ou indirectement, qui répondent elles-mêmes aux conditions d'application de la taxe (actifs ≥ 5 millions, revenus passifs ≥ 50%), une fraction de ces participations est taxable.

La valeur taxable est calculée à proportion des actifs taxables détenus par la filiale et du taux de participation direct et indirect de la holding.

Cette règle évite les montages en cascade : si votre holding détient une sous-holding qui elle-même détient des actifs passifs, la quote-part correspondante est intégrée dans votre base taxable.

Elle est majorée des créances détenues sur la filiale ou sur une société interposée par la holding, et de certaines dettes contractées auprès du redevable ou de sociétés contrôlées (sauf justification qu'elles n'ont pas été consenties dans un objectif principalement fiscal).

Ce qui est exclu de la base d'imposition

Pour éviter de taxer les vrais actifs professionnels, plusieurs catégories d'actifs sont exclues de la base :

1. Les titres de participation

Ne sont pas taxés les titres qui donnent un caractère comptable de participation ou de détention d'au moins 5% des droits de vote de la société holding (sauf si ces titres ont été précisément acquis pour échapper à cette taxe).

2. Les titres de jeunes PME communautaires

Exonération pour les titres détenus avant le 1er janvier 2026 ou souscrits après cette date, à condition que la PME :

  • Ait son siège de direction effective dans l'UE ou l'EEE (avec convention d'assistance administrative)
  • Exerce une activité opérationnelle à titre exclusif
  • Exerce cette activité sur un marché depuis moins de 10 ans après son enregistrement ou moins de 7 ans après sa première vente commerciale

3. Les parts de FCPR/FPCI dits "fiscaux"

Sont exonérés les parts de fonds relevant des dispositions de l'article 163 quinquies B du Code général des impôts (fonds éligibles à la réduction ISF-PME ou IR-PME dans le passé).

Les obligations déclaratives

Si la société a son siège en France

Elle devra joindre à sa déclaration de résultat une annexe détaillant les calculs réalisés. La taxe est due au titre des exercices clos au 31 décembre 2025, et sera pas déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

Le paiement aura lieu lors de la liquidation du solde d'impôt sur les sociétés, soit le 15 mai de l'année N pour une clôture au 31 décembre de l'année N-1.

Si la société a son siège hors de France

Ce sont les personnes physiques résidentes fiscales de France qui contrôlent la société et qui sont redevables de la taxe. Elles devront déclarer la taxe lors de leur déclaration annuelle de revenus.

Dans ce cas, la taxe sera due à compter des exercices clos au 31 décembre 2026.

Incidence en matière d'IFI

Les actifs immobiliers qui auront été soumis à cette taxe sur les holdings seront exonérés d'IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière).

Cette exonération permet d'éviter une double imposition : vous ne payez pas à la fois la taxe holdings à 2% sur l'immeuble détenu en société et l'IFI à titre personnel sur ce même bien.

En revanche, les autres actifs (liquidités, titres financiers, œuvres d'art, yachts) restent potentiellement soumis à l'IFI s'ils remplissent les conditions d'assujettissement.

Ce que ça change concrètement

Exemple 1 : Holding familiale avec immobilier et liquidités

Monsieur Dupont détient 100% d'une holding française qui possède :

  • Une résidence secondaire à Deauville : 3 millions d'euros
  • Un portefeuille de titres non cotés : 4 millions d'euros
  • Des liquidités : 1 million d'euros

Total des actifs : 8 millions d'euros.

La holding perçoit uniquement des dividendes (80% du total des produits) et des loyers occasionnels.

Analyse :

  • Actifs > 5 millions : ✅
  • Détention > 33,33% par une personne physique : ✅
  • Revenus passifs > 50% : ✅
  • Pas contrôlée par une société soumise à la taxe : ✅

Calcul de la taxe :

  • Résidence secondaire : 3 millions (taxable)
  • Liquidités et titres : 5 millions, minorés des abattements (à déterminer selon la situation)
  • Suppose que la base taxable finale soit de 6 millions d'euros

Taxe due : 6 000 000 × 2% = 120 000 €

À payer chaque année, tant que les conditions restent remplies.

Exemple 2 : Holding avec activité opérationnelle

Madame Martin détient 60% d'une holding qui possède :

  • Des parts dans 3 PME opérationnelles (participation > 5%) : 7 millions d'euros
  • Un immeuble de bureaux loué aux PME du groupe : 2 millions d'euros
  • Une Ferrari de collection : 500 000 euros

Analyse :

  • L'immeuble de bureaux est affecté à une activité professionnelle : non taxable
  • Les participations > 5% dans des sociétés opérationnelles : non taxables
  • La Ferrari : taxable (500 000 euros)

Mais la holding perçoit majoritairement des revenus opérationnels (dividendes de PME opérationnelles, loyers professionnels). Si ces revenus représentent plus de 50% du total et ne sont pas considérés comme passifs, la holding échappe à la taxe.

Si en revanche les revenus passifs dépassent 50%, la taxe s'applique uniquement sur la Ferrari : 500 000 × 2% = 10 000 €.

Les stratégies pour limiter l'impact

1. Affecter les actifs à une activité professionnelle

Si vous pouvez démontrer qu'un bien est affecté à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale, il sort de la base taxable.

Exemple : transformer une résidence secondaire en bien locatif meublé professionnel (LMP ou LMNP) si vous remplissez les conditions.

2. Diluer la détention sous 33,33%

Si aucune personne physique (et son cercle familial) ne détient plus de 33,33% de la holding, la taxe ne s'applique pas.

Attention toutefois : cette stratégie peut avoir des conséquences en matière de contrôle et de transmission patrimoniale. À manier avec précaution.

3. Générer des revenus non passifs pour repasser sous le seuil des 50%

Si vous pouvez développer une activité opérationnelle ou augmenter les revenus non passifs (par exemple via une activité de conseil, de gestion active, de prestations de services), vous pouvez repasser sous le seuil de 50% de revenus passifs.

4. Réduire les actifs sous 5 millions d'euros

Distribuer des actifs, céder certains biens, transférer des liquidités... Si vous descendez sous 5 millions d'actifs, la taxe ne s'applique plus.

Mais cette stratégie peut avoir des inconvénients fiscaux (plus-values, droits de mutation) et patrimoniaux (perte de l'effet holding).

5. Anticiper la transmission

Cette taxe annuelle vient s'ajouter aux droits de succession et de donation. Elle peut modifier l'équation économique d'une transmission patrimoniale via une holding.

Il devient urgent de revoir les schémas de transmission pour intégrer cette nouvelle charge récurrente.

Notre recommandation : faites le point maintenant

Cette taxe est complexe. Elle nécessite une analyse fine de votre situation patrimoniale, de la structure de votre holding, de la nature de vos actifs et de vos revenus.

Ne découvrez pas en mai 2026 que vous devez 80 000 ou 150 000 € de taxe supplémentaire sans l'avoir anticipé.

Chez HR Associés, nous accompagnons nos clients dans :

  • L'analyse de l'éligibilité à cette taxe
  • Le calcul précis de l'assiette et du montant dû
  • La recherche de leviers d'optimisation légaux
  • La restructuration patrimoniale si nécessaire
  • L'anticipation des obligations déclaratives

Cette taxe va impacter des milliers de holdings patrimoniales en France. Mais toutes ne sont pas logées à la même enseigne. Certaines peuvent s'organiser pour limiter l'impact, d'autres devront l'intégrer dans leur gestion annuelle.

L'essentiel, c'est de ne pas subir. Anticipez, chiffrez, organisez-vous.

Le texte n'est pas encore définitivement voté. Les débats parlementaires peuvent encore modifier certains points. Nous suivons l'évolution de près et vous tiendrons informés des ajustements éventuels.

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